Là où la tendresse guérit

Le jour où je me rends au CHU Saint-Pierre, je ne sais pas trop où me diriger tant les lieux sont immenses. Une ville dans la ville, me répétera-t-on souvent. On me dit d’aller voir en néonat’ car il s’y produirait des miracles. C’est ici que sont dispensés les soins intensifs des bébés qui sont sortis trop tôt du ventre de leur mère. Il y a aussi ceux qui sont arrivés à l’heure, mais avec de sérieux problèmes. L’atmosphère y est pourtant étrangement chaleureuse : les bonjours sont dits avec douceur, des faire-parts sont accrochés aux murs, et il fait bien chaud en ce matin d’hiver glacial. Seuls quelques bips-bips rappellent qu’il y a derrière ces portes des êtres sur lesquels veiller de près.
Marie, qui dirige ce service, me présente un à un ses minuscules patients. Elle me raconte leur histoire en même temps que son travail, et j’observe ses collègues changer une couche comme si elles manipulaient le cristal le plus fin. Ce service a été pionnier dans la mise en place du NIDCAP, un programme dans lequel le rythme propre à chaque nourrisson dicte l’agenda du service, et non l’inverse. Ainsi, leur comportement est patiemment observé pour s’adapter à leurs besoins et à leur évolution. Les isolettes, dans lesquelles sont placés les bébés, véritables bijoux technologiques, permettent de reproduire au mieux les conditions du ventre de leur maman.
Marie me dit qu’en réalité, les parents sont les premiers soignants des bébés. Ce sont eux qui les observent des heures durant et qui détiennent la connaissance intuitive de leur enfant et de ses besoins. Leur peau, leur odeur et leur voix sont des médicaments irremplaçables. Alors ici, tout est aménagé pour leur permettre de rester en permanence tout près de leur nourrisson. Je trouve cette organisation merveilleuse et je demande à Marie si les soins adultes sont organisés de la même façon, en se basant sur le rythme propre à chaque patient. Elle me sourit, me dit que non, pas encore, mais que oui, ce serait aussi une très bonne chose pour les adultes. C’est une fois de plus par les enfants que nous aurions tout à apprendre.